Mon parcours

En 2009, ont brusquement ressurgi à ma mémoire les souvenirs de viols oubliés perpétués par un cousin éloigné alors âgé de 39 ans. J’avais alors 5 ans. Ces crimes sont remontées à ma conscience telle une bombe atomique avec tous les détails, sensations et autres émotions….

J’ai mis deux ans à parvenir à porter plainte même si je savais que les faits étaient prescrits. A la suite de ma plainte en septembre 2011, mon agresseur a été auditionné. Il a confirmé le moindre détail des mes souvenirs mais nié les faits. Il a refusé la confrontation que je réclamais (ce qui était dans son droit en tant que témoin). Ma plainte a été classée sans suite du fait de la prescription.

Avec mon conseil, Me Gilles-Jean Portejoie, nous avons fait appel de la décision de justice et été jusqu’en cour de Cassation pour tenter de faire reconnaître mon amnésie traumatique comme un « obstacle insurmontable » m’ayant empêché de déposer plainte dans les temps. Une première en France. Notre demande a été rejetée mais deux sénatrices Muguette Dini et Chantal Jouanno se sont saisies de notre argumentaire pour déposer une proposition de loi au Sénat. Celle-ci s’est finalement traduite par un allongement aux 30 ans après la majorité de la prescription pénale en cas de crimes sexuels sur mineurs.

L’Assemblée nationale a rejeté cette proposition de loi mais confié une mission à deux députés, Georges Fenech et Alain Tourret portant sur une révision globale de la prescription pénale en matière de crimes et délits. Leur rapport a donné lieu à la loi de février 2017 qui n’a rien changé en matière de prescription pénale des crimes sexuels sur mineurs. En revanche cette loi a inscrit l’obstacle insurmontable comme élément suspensif de la prescription.

C’est sur cette base juridique que nous nous battons depuis un an aux côtés de la Dre Muriel Salmona pour faire reconnaître l’amnésie traumatique comme un « obstacle insurmontable » suspendant la prescription. Entre temps j’ai été auditionnée par la mission de l’animatrice Flavie Flament et de l’ex-magistrat Jacques Calmettes qui a abouti à l’allongement actuel de la prescription aux 30 ans après la majorité.

Partie d’un combat individuel, je suis désormais totalement investie dans un combat collectif seul à même de faire bouger les lignes sur ces questions cruciales des violences sexuelles et de l’amnésie traumatique.

Avec Natacha Bras, Valérie Temprement et Samir Ben Salem, nous avons fondé l’association « MoiAussiAmnesie » en mai 2018. Nous oeuvrons non seulement pour notre cause autour de l’amnésie traumatique mais aussi au sujet de toutes les violences sexuelles.

Nous avons également décidé de nous positionner sur les grands débats nationaux concernant ces questions en signant des pétitions ou en nous mobilisant aux côtés d’autres associations.

Merci d’avance pour votre soutien, votre participation dans notre cause commune,

#Solidarite #Sororite #Fraternite

Mié Kohiyama, présidente de « MoiAussiAmnesie ».

Agée de 46 ans, je suis journaliste et vis entre Lyon et Paris. Auteure de « Le petit vélo blanc » (Editions Calmann-Lévy) qui retrace le parcours que je viens de détailler. Je l’ai écrit sous le pseudo de Cécile B. étant à l’époque trop fragile pour assumer une expression publique.