Bonsoir à tous,

Nous publions avec son accord et sous anonymat strict, le témoignage de R. 33 ans, qui a participé hier au premier groupe parisien de victimes d’amnésie traumatique suite à des violences sexuelles. R. a été violée dans l’enfance à partir de l’âge de sept ans. Elle est sortie d’amnésie il y a à peine deux ans.

Son témoignage nous émeut d’autant plus que R., benjamine du groupe et institutrice, est actuellement hospitalisée. Elle est venue au groupe en accord avec son équipe soignante lors d’une permission, sa sortie étant prévue la semaine prochaine. Elle nous confiait ce soir qu’elle avait hâte de reprendre le cours de sa vie, forte des “énergies” de notre groupe.

“Bonjour à toutes (et Samir),

En tant que “benjamine” du groupe j’étais venue chercher de la résonance et comme je vous l’ai dit j’ai trouvé ce que je suis venue chercher.

Mais au-delà, je me suis rendue compte que vos paroles m’ont rendue ma légitimité de victime, d’autant plus dans les conditions de l’amnésie traumatique. Car quand les souvenirs resurgissent et que l’on se sent devenir folle, que l’on doit reconstruire les souvenirs (en croyant être) à la limite de l’invention, ça fait entrer le doute.

Et puis, vous m’avez réconciliée avec ce terme “victime”. Non pas que je ne me sentais pas victime mais je refusais de l’être. Pour moi, contrairement à Natacha, une victime n’est pas forcément décédée, c’est quelqu’un de faible. Et je refusais cette faiblesse. Mais en vous voyant toutes victimes et fortes, je me suis sentie faisant partie de ce groupe en acceptant peut-être d’appartenir pour une partie de mon histoire à la catégorie “victime”.

Vous m’avez apportée toutes vos forces.

Et finalement, ce matin, je me dis que peut-être mon combat sera aussi de médiatiser cette amnésie traumatique, à ma manière et sans plus en avoir honte.

Alors pour toutes ces petites lumières que vous avez réveillées en moi, je vous remercie. Je sais maintenant que je ne suis plus seule”.

Mié Kohiyama pour le groupe “MoiAussiAmnesie”

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