Chers amis,

Parce qu’il est crucial de remettre le monde à l’endroit par respect et égard aux victimes d’amnésie traumatique suite à des violences sexuelles qui ont suffisamment souffert de déni, nous avons demandé à des psychologues, pédopsychiatres et universitaires de nous aider à décrypter la “manipulation rhétorique” autour du supposé “risque de l’épidémie des faux souvenirs”.

Cet exercice nous semble crucial pour nous aider à démanteler ce qui est présenté comme une vérité médicale ou scientifique et qui ne l’est absolument pas.

Et donc combattre par la connaissance de faux arguments, dangereux, tendancieux et nuisibles à la situation des victimes de violences sexuelles et d’amnésie traumatique déjà très lourde et souffrante. Et enfin, pour ne pas laisser s’instiller le doute dans l’esprit de certains de nos responsables ou d’autres professionnels qui seraient tentés d’écouter ces arguments fallacieux.

Nous allons essayer d’être le plus clair possible même si le décryptage de ces sophismes entraîne des explications parfois techniques.

Dans de récents articles, une personne qui travaille dans le domaine du soin et faisant encore un peu autorité part en premier lieu d’un postulat non vérifié et faux: à savoir que “les risques d’une épidémie de +faux souvenirs+ seraient liés “à la fascination médiatique générée par le concept de mémoire traumatique”.

Pour tenter de démontrer ce faux postulat, cette personne évoque plusieurs événements très éloignés du sujet central mais connus de tous et ce, pour en modifier le sens et en tirer des conclusions fausses.

Pourquoi parler de “manipulation rhétorique”?

Parce que cette personne utilise des assertions tendancieuses ou des postulats de base faux, non prouvés ni par des références ni par des arguments ni par le sens logique le plus élémentaire :

Premier faux postulat : une fascination médiatique entraîne une épidémie de faux souvenirs.

Deuxième faux postulat : la suggestibilité des personnes (en général) crée des épidémies de fausses maladies. Par exemple, la maladie spasmophilique a été créée par la médiatisation de cette maladie. En vérité, le postulat sur lequel les médecins psychosomaticiens s’accordent est que les manifestations psychosomatiques peuvent prendre des expressions variées en fonction des époques mais la souffrance psychique à l’origine de cette expression n’est nullement créée par la médiatisation.

En tordant le sens du raisonnement, cette personne aboutit à une conclusion fausse en procédant à un amalgame ainsi qu’à une généralisation : “les effets désastreux de la généralisation d’une théorie portée au rang de dogme a entretenu le déni des graves maltraitances pendant un siècle”.

Or cela n’est pas la généralisation d’une théorie portée au rang de dogme qui a nui à la reconnaissance des victimes mais la propagation d’une théorie anti-victimaire –ce que l’auteur omet de préciser– laissant ainsi entendre que toute généralisation est nuisible aux victimes…aboutissant ainsi à un troisième postulat faux.

Ce qui est terrible est que cette personne reconnait d’une part tout le mal que les théories anti-victimaires (SAP, mythe de la suggestibilité de l’enfant) font aux victimes tout en sous-entendant dans le même temps qu’une parole mal recueillie pourrait être fausse. “On est donc face à une propostion paradoxale, paradoxante et dissociante, dont on sait en hypnose qu’elle provoque une dissociation psychique” très nuisible aux victimes qui sont souvent totalement déstabilisées par ce type de discours, souligne un psychiatre.

Selon cette personne, l’épidémie des faux souvenirs aurait été recensée au milieu des années 1980 aux Etats-Unis et de citer “les 50.000 cas recensés” pour ensuite terminer par insinuer que ces plaintes étaient fausses.

Or en réalité, pour pouvoir prouver une épidémie de faux souvenirs, il faut non pas prouver qu’il y a eu une augmentation des plaintes mais prouver qu’il y a eu une augmentation significative des fausses allégations par rapport au nombre de plaintes. Or, quelques rares procès où les fausses allégations auraient été dévoilées, ne suffisent absolument pas. Il serait nécessaire de prouver que le taux de fausses allégations dépasse largement celui connu (habituellement d’environ 1%) ce qui n’est absolument pas le cas.

L’auteur n’amenant en outre aucune étude qui irait en ce sens.

IL EST DONC ABERRANT DE CONCLURE SANS ÉLÉMENT SCIENTIFIQUE NI ÉTUDE ÉPIDÉMIOLOGIQUE PROBANTS QU’IL Y AURAIT UNE “ÉPIDÉMIE” DE FAUSSES ACCUSATIONS!…

Enfin, cette personne souligne que certains avocats savent faire référence aux théories anti-victimaires pour défendre les agresseurs. Mais cela n’est pas à cause des excès médiatiques et de leurs conséquences qu’il les utilisent mais parce qu’ils détournent les véritables théories vérifiées en de fausses théories.

Cette personne attribue donc une fausse cause au phénomène de l’utilisation des théories anti-victimaires. La véritable cause étant que ces théories sont inventées pour servir les agresseurs et que leurs défenseurs arrivent parfois à les divulguer dans la presse pour s’en servir. Cet auteur inverse encore une fois la cause et la conséquence.

Sur la dissociation traumatique, l’auteur commence par toute une série de données admises de tous et validée par la communauté scientifique. Puis, il affirme un nouveau postulat faux (non démontré, non vérifié et à contre sens de la logique la plus élémentaire) : pour lui, la médiatisation de la dissociation traumatique entraînerait une épidémie d’allégations invérifiables, ce qui nuirait aux victimes.

Là encore il y a un détournement du sens de la logique car ce n’est pas la médiatisation qui porte la responsabilité du fait que ne peuvent pas être vérifiées des allégations mais simplement le fait que les allégations d’abus sexuels ne sont pratiquement jamais probantes au sens judiciaire du terme car par essence il n’y a que très peu de révélations immédiates, donc de prélèvement ADN, de témoins, pratiquement jamais d’enquête, pratiquement jamais de preuves…

Ceci n’a donc absolument rien à voir avec la médiatisation de la dissociation traumatique et l’hypothétique épidémie qui en découlerait. Cette personne désigne encore une fois une cause pour un phénomène qui n’a pas lieu d’être.

Elle insinue aussi, sous couvert de sages conseils de précaution, que les thérapeutes pourraient valider par erreur de fausses impressions d’abus sexuels et donc influencer leurs patients vers de fausses allégations en participant ainsi à l’épidémie.

Pire encore, derrière un air paternaliste protecteur (qui serait pour le bien des victimes) cette personne insiste sur le fait qu’un dépôt de plainte nécessite des éléments matériels : témoignages, antécédents judiciaires ou aveux de l’auteur présumé, troubles psychologiques compatibles avec les allégations.

Ceci est déontologiquement très grave car un soignant a une obligation éthique de signaler par exemple les mineurs en danger et certainement pas de s’enquérir comme un enquêteur des preuves que le patient peut apporter, ni pour le conseiller de déposer ou non une plainte. Cela ne serait pas déontologique d’ailleurs de la part d’un soignant de se substituer à une autre fonction (policière) que la sienne.

Cette personne écrit enfin qu’elle “ne conteste pas que les plaignants soient sincères et qu’ils souffrent, mais une multiplication de plaintes classées sans suite déchaînera l’ire des sceptiques et nuira gravement à la reconnaissance des victimes”.

Là encore, sont inversées la nature de la cause et la conséquence puisque ce n’est nullement le nombre de classements sans suite qui nuit à la reconnaissance des victimes mais la non reconnaissance des victimes qui entraîne les classements sans suite et qui leur nuit

Enfin en conclusion après avoir réaffirmé “l’authentique épidémie (non démontrée) des faux souvenirs” qui a frappé les Etats-Unis et qui nuirait encore gravement aux victimes en France, où rien de tel n’a été constaté, il termine par une nouvelles vérité prouvée et admise de tous sur les dégâts des théories anti-victimaires et l’état actuel des connaissances sur les causes des non-révélations des victimes de violences sexuelles.

Pour résumer, ce discours démontre l’utilisation d’une rhétorique manipulatoire :

  • de nombreuses inversions des causes et des conséquences
  • la manipulation habile de faits historiques incontestables, assertions reconnues de tous mêlées à de fausses affirmations péremptoires, de faux postulats, ou affirmations tendancieuses.
  • Cette personne multiplie des vérités admises de tous suivies de propositions paradoxales dissociantes et d’affirmation péremptoires, technique utilisée en hypnose.

Il est donc pour le moins étonnant que cette personne, qui dit souhaiter alerter les autorités des risques non vérifiés de fausses suggestions de violences sexuelles par des thérapeutes, utilise les mêmes procédés hypnotiques et suggestifs pour faire passer une pure idéologie sans aucun fondement.

Mié Kohiyama pour le groupe “MoiAussiAmnésie”

 

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